Comment récupérer et conserver ses graines de courgettes

​Récupérer ses propres semences de courgettes, une pratique traditionnelle, permet de multiplier ses variétés préférées, de devenir autonome en graines et d’obtenir des semences adaptées à ses conditions de culture et à son terroir. Cet article vous guidera pas à pas pour réussir cette opération, depuis la compréhension des mécanismes de reproduction des courgettes jusqu’à la conservation des graines.

Pour faire ses graines de courgettes, il est essentiel avant tout de comprendre les mécanismes de reproduction de cette espèce.

Les courgettes sont des plantes monoïques strictes, aux fleurs unisexuées, c’est-à-dire qu’un même plant porte à la fois des fleurs mâles et des fleurs femelles différenciées. Les fleurs mâles possèdent des étamines— constituée d’un filet et d’une anthère — libérant le pollen, alors que les fleurs femelles présentent un pistil— formé par l’ovaire, le style et le stigmate — prêt à recevoir ce pollen pour la fécondation.

Les fleurs mâles et femelles sont donc séparées dans l’espace. Bien que les fleurs femelles peuvent être fertilisées par le pollen des fleurs mâles de la même plante, à l’aide d’un vecteur, elles sont majoritairement fécondées par du pollen provenant d’autres plants de courgettes. Ce mécanisme de pollinisation croisée est généralement assuré par les insectes, notamment les abeilles, qui se posent successivement sur les fleurs des différents plants.

La pollinisation c’est transport du pollen des fleurs mâles vers le stigmate des fleurs femelles. Elle peut être assurée par différents vecteurs comme l’eau, le vent, la gravité, les insectes ou d’autres animaux, etc.

La mise en contact du pollen sur le stigmate permet la fécondation des plantes. Ainsi, lorsque l’ovaire est fécondé par le pollen il donnera naissance au fruit : la courgette, contenant les précieuses semences.

​Avant de se lancer dans la production de semence, il faut toutefois comprendre quelques notions concernant les croisements afin de récupérer des graines conformes à la description des variétés multipliées.

L’hybridation naturelle est le résultat de la pollinisation, majoritairement, entre deux variétés différentes d’une même espèce et, plus rarement, entre deux espèces. Aucune fécondation croisée et donc d’hybridations naturelles n’est possible entre les diverses espèces du genre Cucurbita. Il existe seulement une probabilité très réduite impliquant l’espèce Cucurbita argyrosperma.

Dans ce contexte, les butternuts, les potirons, les potimarrons, les pastèques, etc. — d’espèces distinctes — ne pourront pas se croiser avec une courgette. Elle appartient à l’espèce Cucurbita pepo et toutes les variétés de cette espèce pourront s’hybrider naturellement entre elles. Cette espèce comprend en plus des courgettes : les pâtissons, les courges acorn, les citrouilles et autres courges pepo.

​Ainsi, lorsque le pollen d’une variété de courgette arrive sur le stigmate d’une autre variété de courgette ou d’un pâtisson, il y a une pollinisation croisée et les graines issues de ces fruits pollinisés porteront l’hybridation dans leurs gènes. Elle ne se voit donc pas directement sur les fruits l’année même, mais sera visible sur ceux provenant du semis de leurs graines, l’année suivante. ​

Les deux courges ainsi que le pâtisson en photo ci-dessus appartiennent tous à l'espèce Curcubita pepo. Ainsi, ils peuvent naturellement se croiser entre eux au jardin ainsi qu'avec toute autre variété de courgette. 

​Comme les hybridations sont portées dans les graines, il est essentiel pour les jardiniers désireux de faire leurs propres semences d’empêcher les croisements au jardin afin d’obtenir des graines conformes à la description de la variété reproduite. Par ailleurs, les jardiniers souhaitant simplement profiter de récolte de fruits, sans récupérer les graines, pourront se passer des mesures à mettre en place pour prévenir les croisements. 

Différentes méthodes permettent d'empêcher les pollinisations croisées au jardin. 

L’isolement spatial

L’isolement spatial consiste à éloigner suffisamment différentes variétés d’une même espèce pour éviter que les insectes pollinisateurs visitent, tour à tour les fleurs de ces variétés distinctes. La distance d’isolement conseillée entre deux variétés de courgettes est de 500 mètres à 2 kilomètres, en fonction des régions, des ressources en nourriture disponibles, de la topographie, ou encore des barrières naturellement présentes comme les haies, les bocages, etc. Cette méthode est donc possible seulement pour les grands espaces, exempts de voisinage. 

La pollinisation contrôlée

Les méthodes de pollinisation contrôlée, comme la pollinisation manuelle, offrent aux jardiniers la possibilité de produire des semences de plusieurs variétés d’espèce identique dans le même jardin sans tenir compte des distances d’isolement. La pollinisation manuelle consiste à mettre directement en contact le pollen des fleurs mâles sur les fleurs femelles pour les féconder. La main des jardiniers devient ainsi le vecteur de la pollinisation des fleurs de courgettes.

La culture sous voile

Cette technique consiste simplement à cultiver toutes les plantes de la même variété sous un voile de protection comme un tunnel de moustiquaire ou une serre insect-proof. Ce type de culture nécessite toutefois d’introduire sous la protection des ruchettes d’insectes pollinisateurs, car sans eux les plantes ne pourront pas être fécondées. 

​Lors de la production de graine, il est essentiel d’éviter tout risque d’hybridation naturelle entre différentes variétés de courgette. Il faudra donc soit cultiver une seule variété de l’espèce Cucurbita pepo et s’assurer que les jardins les plus proches n’en cultivent pas non plus, soit polliniser manuellement les fleurs de courgettes. ​

Pour obtenir et récolter des semences de courgette de qualité, conformes à la description de la variété multipliée, il faut respecter certaines étapes clés :  

1. Cultiver une seule variété à la fois ou pratiquer une pollinisation manuelle pour conserver la pureté variété.
2. Avoir suffisamment de plants de la même variété.
3. Sélectionner les plantes les plus saines et celles qui portent des fruits conformes à la description de la variété reproduite.  
4. Récolter les fruits bien matures.
5. Extraire, nettoyer et sécher les graines. 
6. Conserver les graines.

Dans la production de semences, il doit y avoir un bon brassage génétique entre différentes plantes de la même variété pour offrir aux futures graines un large panel de gènes. Plus leur éventail génétique sera grand, plus elles auront la possibilité de s’adapter à leur environnement.    

Pour les courgettes, il est recommandé de cultiver au moins 3 plantes d’une variété ensemble, 10 pour effectuer un meilleur travail de sélection. Les plants destinés à la récolte des graines sont appelés des porte-graines.

Surveillez tout au long de la saison les porte-graines et arrachez tous les plants différents de la description de la variété, les malades ou les “hors type” c’est-à-dire ceux qui sont dissemblables de tous les autres d’une quelconque manière. Cette opération doit impérativement se faire avant la floraison. Si elle est effectuée plus tard, il y a des chances que les fleurs aient déjà pollinisé celles des plantes saines et conformes.  

Généralement, les producteurs de semences gardent le premier fruit des premiers porte-graines à fructifier pour en récolter les graines. Ce choix permet d’orienter la sélection sur la précocité des courgettes : un critère souvent apprécié pour profiter de délicieux légumes tôt dans la saison. 

Lorsque les plants de courgettes arrivent en fin de cycle, les fruits deviennent très gros et changent de couleur pour prendre des teintes de jaune-orange, et les plants entiers commencent à sécher. Ces signes annoncent que les fruits sont prêts à être récoltés pour en récupérer leurs graines. 

Coupez alors les fruits matures à l’aide d’un sécateur et entreposez-les, le plus longtemps possible, dans un endroit frais et à l’abri avant de les ouvrir pour extraire les semences. Les graines continuent de se former à l’intérieur du fruit, même après sa récolte. Après un mois ou plus, la qualité et la viabilité des semences sont meilleures. 

​Pour extraire les graines, coupez la courgette en deux dans le sens de la longueur en veillant à ne pas enfoncer la lame du couteau trop à l’intérieur du fruit afin d’éviter de sectionner des graines. Retirez-les à la main et placez-les dans un seau propre, puis lavez-les à l’eau pour détacher les pulpes accrochées. ​

Après avoir bien nettoyé les graines de courgette, mettez-les immédiatement à sécher. Pour cela, étalez-les sur un tamis ou une claie et disposez le tout dans un endroit sec et ventilé. Utilisez éventuellement un ventilateur pour accélérer le séchage. Les semences totalement sèches cassent si elles sont pliées. 

Une fois bien sèche, placez les graines dans un sachet en papier, dans une boite hermétique, et stockez-les à l’abri de la lumière ainsi que des variations de température et d'humidité. Pensez à écrire le nom de la variété et l’année de récolte sur le sachet.

​Les graines de courgettes ont une faculté germinative moyenne de 6 ans, mais peuvent la conserver jusqu’à 10 années et plus si elles sont stockées dans des conditions optimales.​

​La production de semence vous permettra d’être autonome en graines de courgette, mais surtout d’avoir des semences adaptées à votre propre terroir. Faire ses graines est à la portée de tous les jardiniers et offre une vision globale du cycle de la plante de la graine à la graine. Alors n’hésitez plus et pratiquez ce savoir-faire ancestral ! ​